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Euthanasie pour troubles psychiques: Est-ce justifiable comme aux Pays-Bas?

La détresse psychologique, aussi insoutenable qu’elle puisse être pour celui qui en souffre, devrait-elle figurer parmi les critères autorisant l’assistance à la fin de vie ? Les Pays-Bas répondent affirmativement, ayant récemment accepté la requête de Zoraya ter Beek, une jeune femme néerlandaise de 29 ans. Bien qu’elle soit en excellente condition physique, elle endure une dépression chronique, une anxiété intense et un trouble de la personnalité limite. Ces troubles, qu’elle considère insupportables, n’ont jamais été soulagés par les traitements existants, la poussant à solliciter cette aide.

L’euthanasie pour apaiser la souffrance mentale, une question en vogue

Zoraya ter Beek a donc obtenu l’autorisation tant recherchée suite à un processus de trois ans et demi, en accord avec une législation néerlandaise établie en 2002. Selon cette loi, l’euthanasie est légale pour les individus éprouvant des « souffrances insupportables sans espoir d’amélioration« , y compris les souffrances d’ordre psychologique.

En France également, ce débat est actuellement sur la table. Tandis que les législateurs discutent actuellement de l’adoption d’une loi sur l’assistance à mourir, Sandrine Rousseau a présenté hier une proposition de loi visant à traiter de manière équivalente les souffrances physiques et mentales.

« Il est inapproprié de créer une hiérarchie entre les souffrances physiques et psychologiques, car les deux sont interconnectées » a-t-elle plaidé avec ferveur.

La question de l’incurabilité en psychiatrie

Joachim Müllner, psychiatre et membre du comité d’experts SAmu de France, trouve la question particulièrement complexe dans le domaine de la psychiatrie. Il explique :

« En psychiatrie, la plupart des troubles sont considérés comme ‘incurables’ dans le sens où l’on ne peut pas ‘guérir’, c’est-à-dire éliminer complètement les causes des symptômes et de la souffrance qui en résulte. Toutefois, les traitements visent à réduire les symptômes au maximum pour que la souffrance causée par ces troubles soit la moins pénible possible. Contrairement à d’autres, la dépression est une des rares maladies psychiatriques qui peut être totalement guérie grâce à un traitement médicamenteux et psychothérapeutique. »

Cependant, dans le cas de la patiente néerlandaise, l’expert ne comprend pas l’autorisation accordée, mentionnant : « Outre une dépression, il s’agit ici d’un trouble de la personnalité ‘borderline’ qui, bien qu’il ne soit pas ‘curable’, peut néanmoins être suffisamment atténué pour que le patient puisse vivre sans handicap majeur et sans envisager le suicide assisté. »

Une capacité de réflexion compromise par les troubles

De plus, et c’est un point crucial, dans ce type de trouble, les pensées suicidaires ne sont pas le résultat d’une réflexion autonome et éclairée qui pourrait justifier une telle démarche mais sont plutôt symptômes du trouble lui-même.

« Pour l’instant, en psychiatrie, il n’est pas concevable de considérer ces idées suicidaires comme une demande légitime mais plutôt comme le signe d’une souffrance qui n’est pas encore adéquatement prise en charge et qui nécessite des ajustements ou une intensification du traitement (hospitalisation, augmentation des doses d’anxiolytiques, sédatifs, etc.) » s’alarme l’expert.

Une perspective différente de celle de la souffrance physique selon notre expert

Selon le psychiatre, nous sommes ici face à une situation complètement différente de celle d’une souffrance physique insupportable liée à une maladie incurable pour laquelle, oui, « l’option d’une fin de vie perçue comme ‘digne’ est pleinement justifiée. »

« Enfin, il est absolument aberrant de débattre aujourd’hui sur des cas théoriques et, s’ils existaient, extrêmement rares qui auraient épuisé toutes les options thérapeutiques disponibles à ce stade de l’histoire de la médecine, alors que la psychiatrie manque déjà cruellement de ressources élémentaires pour offrir même les traitements de base (nombre de lits en hospitalisation, quantité de médecins, psychothérapies adaptées, etc.) » conclut notre expert.

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